Transition écologique : quelle place pour les cadres ?
L’APEC, Association pour l’Emploi des Cadres, se place dans l’écosystème de l’emploi en partageant son expertise des mutations de l’emploi, face à de nouvelles demandes de compétences et à l’évolution des technologies. Dans ce cadre, elle s’intéresse naturellement à la question essentielle et actuelle de la transition écologique – en lien avec la conscience environnementale qui s’est internationalisée avec l’aggravation du réchauffement climatique, de la pollution et la multiplication des catastrophes naturelles -, et de son impact sur le monde du travail, notamment sur les nouvelles opportunités de métiers et de formation. C’est ce qu’elle analyse dans son baromètre 2024 “Transition écologique et emploi cadre” que nous avons lu pour vous.
Croissance et défis des métiers verts
Les nouveaux enjeux qui se sont propagés dans les préoccupations du monde de demain sont sources d’espoir pour l’écologie, mais aussi pour l’économie et le renouveau des métiers. Ils sont également vecteurs d’inquiétudes et de contraintes, car si de nouveaux emplois sont créés, d’autres sont voués à disparaître, ou du moins, à évoluer. Par conséquent, afin de répondre aux nouvelles exigences d’un nouveau monde plus conscient et plus sain, le marché de l’emploi doit changer lui aussi.
Selon l’INSEE, sur 870 620 cadres du privé en 2021 :
- 28 850 cadres ont un “métier vert”, c’est-à-dire un métier dont les compétences servent à une finalité de prévention, mesure, maîtrise et correction des impacts négatifs et dommages sur l’environnement.
- 84 170 cadres ont un métier “verdissant”, c’est-à-dire un métier qui est amené à se transformer du fait des impératifs de la transition écologique, en faisant appel à de nouvelles compétences.
Il apparaît alors que depuis 2019, les statistiques relatives à l’emploi cadre dans les secteurs liés à la transition écologique connaissent une forte évolution. Bien que ce phénomène soit encore récent, les premières tendances indiquent un développement notable des métiers verts : +56% en 5 ans au niveau national, avec un total de 12 400 offres partagées en adéquation avec ces nouveaux besoins de la transition écologique. Pourtant, cet élément reste tout de même à nuancer. En effet, l’étude de l’APEC poursuit en indiquant que ces 12 400 offres ne représentent que 2,2% parmi le total des offres d’emplois cadres publiées sur cette même période, une proportion encore maigre qui s’explique par le caractère nouveau de cette dimension du marché du travail, encore en phase de structuration.
L’ampleur de la transition mise en marche encourage tout de même à penser que les chiffres s’inscrivent dans une continuité croissante de dynamique.
En outre, l’étude démontre que parmi les secteurs en forte demande, et plus précisément celui des services (75%), l’ingénierie R&D (Recherche et développement) représente à elle seule 42% des offres de métiers verts pour l’éco-innovation. Pour impulser la transition, les entreprises investissent en masse dans les compétences d’analyse et de gestion des risques qui sont souvent dévolues à l’encadrement et à la direction.
Ainsi, alors que l’émergence des métiers verts & verdissants et la transformation des secteurs en réponse à la transition écologique suscitent une dynamique de croissance notable, cette évolution se trouve étroitement liée aux investissements stratégiques réalisés par les entreprises. Ces dernières jouent un rôle crucial dans la création de nouveaux emplois, en réorientant leurs priorités vers des secteurs clés, tout en contribuant à redéfinir les compétences et formations nécessaires à cette transition.
Dynamiques d’entreprises : des investissements cruciaux pour la création d’emplois verts
En 2023, 24,5 milliards d’euros ont été investis de manière équitable par les entreprises du secteur privé, toutes tailles confondues, dans le développement durable, soit plus de 7 fois le montant investi en 2019. Ces investissements se tournent principalement en premier vers les énergies renouvelables, premier enjeu de demain du fait de la raréfaction des ressources naturelles et de l’avènement du concept d’économie circulaire, à hauteur de 50% (12 milliards). Viennent ensuite les batteries et véhicules électriques qui représentent ⅓ des investissements, ainsi que les recyclages et les déchets qui atteignent les 12%.
En revanche, le baromètre de l’APEC traduit une répartition inégale de ces financements sur le territoire. Nous pouvons l’expliquer en partie par les impulsions directes des instances décidantes de certaines régions plutôt que d’autres, comme la région Auvergne-Rhône-Alpes qui a intégré les pompes à chaleur dans ses projets phares.
Ces investissements supposent donc des moyens humains plus spécifiques et plus qualifiés : c’est ce que recense l’étude avec un constat de plus de 17 000 emplois salariés qui ont été créés grâce à ces investissements, d’une proportion plus grande chez les TPE-PME qui en prennent/comptabilisent à eux seuls la moitié. Par ailleurs, les offres d’emplois sont plus nombreuses dans les territoires moteurs de l’emploi cadre, particulièrement en Île-de-France, où l’offre de formation est plus importante et plus avancée dans l’intégration de formations spécialisées, et contribue à cette dynamique de territoire.
Ainsi, naturellement, le baromètre se conclut sur le constat que si de nouveaux emplois et de nouvelles compétences sont créés, de nouvelles formations voient le jour pour correspondre à ces nouvelles attentes : 1800 formations de l’enseignement supérieur ont été recensées dans le domaine du développement durable pour accélérer la transition écologique, avec une proportion plus grande pour le management environnemental et la gestion des risques environnementaux (22%), l’aménagement du territoire et du cadre de vie (20%) et le génie énergétique (14%).
Il existe d’ailleurs certaines particularités, où des formations spécialisées sont peu nombreuses au niveau national, mais sont en vérité très présentes et très concentrées dans des territoires spécifiques. C’est le cas de la formation en agro-écologie, dispensée essentiellement en Bretagne et en Bourgogne-Franche-Comté, territoires où l’activité agricole est plus marquée.
Nous pouvons alors dire que les emplois verts de demain se pensent aujourd’hui à travers un chemin tripartite : la formation initiale, la formation continue et la reconversion professionnelle.
La transformation et l’adaptabilité des compétences représentent le cœur de la stratégie des entreprises, qu’elles soient des TPE ou des grands groupes, et se répercutent jusqu’aux Ressources Humaines qui jouent un rôle crucial dans leur promotion auprès des cadres et futurs cadres.
> Pour voir l’étude complète :
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