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3 Questions à… Agnès Pannier-Runacher, Ministre de la Transition écologique, de l’Energie, du Climat et de la Prévention des risques

Ministre de la Transition écologique depuis septembre 2024, Agnès Pannier-Runacher répond aux 3 questions de la Fondation Travailler autrement sur l’impact de la transition écologique sur l’emploi et les compétences.

A l’horizon 2050, si nous devions imaginer la carte des métiers en France, face aux défis liés à la transition écologique, quelles grandes transformations verrions-nous ?

La France métropolitaine se réchauffe plus vite que la planète. Notre scénario, basé sur les estimations des scientifiques, implique une hausse des températures moyennes de 2°C en 2030, 2,7°C en 2050 et 4°C en 2100 par rapport à l’ère préindustrielle.

Derrière une trajectoire probable de réchauffement de +4°C en 2100 se cachent plusieurs réalités. Cette augmentation se traduira de manière différenciée sur le territoire national avec des étés à la température largement supérieure aux normales historiques de saison et des hivers bien plus humides.

A titre d’exemple, à horizon 2100, la Bretagne devrait connaître une augmentation des précipitations en hiver de l’ordre de +15 % et une baisse de l’ordre de -25% en été. Tandis qu’en Occitanie, déjà lourdement frappée par une sécheresse historique qui dure, la diminution projetée des précipitations en période estivale d’ici 2100 atteindrait de l’ordre de -25 %.

C’est donc une mutation très profonde de nos conditions de vie qui va avoir lieu. Tous les métiers, sans exception, vont devoir s’y adapter. C’est justement l’objet du Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC) présenté par le Premier ministre en octobre.

Ce plan constitue une rupture avec les travaux précédemment menés car il intègre pour la première fois une trajectoire à +4°C reprenant directement les travaux des scientifiques. Un objectif de ce plan est très concrètement de lancer le travail avec l’ensemble des secteurs pour anticiper ce que cela signifie, pour chacun d’entre eux, de travailler dans une France à +4°C.

Comment accompagner les salariés dans leur adaptation à la transition écologique, voire dans leur reconversion ?

Le premier enjeu du PNACC, c’est de développer, dans notre pays, une véritable « culture de l’adaptation ». Cela vaut pour les collectivités locales, mais aussi pour nos élèves et pour l’ensemble des salariés et des fonctionnaires. L’ensemble de la société doit intégrer cette nouvelle culture car le dérèglement climatique va transformer le quotidien de chacun.

Pour accélérer cette transition dans le milieu professionnel, dès 2025 :

  • Les enjeux de l’adaptation seront inclus dans les actions de sensibilisation-formation à la transition écologique réalisées par les Chambres de commerce et d’industrie (CCI) et les Chambres des métiers et de l’artisanat (CMA) auprès des 28 000 PMI.
  • Les enjeux de l’adaptation seront intégrés dans les missions des Directions régionales de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (DEETS/DREETS).
  • Au premier semestre 2025, un groupe de travail inter-filières sera animé au sein du Conseil national de l’industrie pour faciliter l’appropriation des outils génériques et sectoriels d’adaptation, le partage d’expériences et la définition de travaux à mener en commun.

Dans tous les secteurs économiques il est désormais nécessaire d’intégrer l’adaptation au changement climatique dans les stratégies d’entreprises.

Plus largement, l’Etat souhaite sensibiliser chacun sur ce sujet important. Pour cela, nous instaurons une semaine de l’adaptation au changement climatique dès 2025 pour que chacun connaisse les risques de son territoire et les bons comportements à adopter au travail et à la maison en cas de catastrophe naturelle. Et nous comptons sur tous les acteurs du monde économique pour s’y associer.

Quels outils ou stratégies votre ministère développe-t-il pour aider les entreprises à anticiper et intégrer les compétences nécessaires à la transition écologique ?

La première nécessité pour s’adapter, c’est d’être informés et d’avoir les bons outils. Cela vaut tout particulièrement pour les entreprises, et c’est l’un des principaux objectifs du PNACC. Pour cela, nous lançons plusieurs initiatives.

Tout d’abord, un guide de référence pour faciliter l’engagement des acteurs économiques dans l’adaptation sera publié en 2025. Ce guide prendra entres autres en compte les vagues de chaleur au travail ou l’adaptation des bâtiments tertiaires au changement climatique et intégrera des solutions aux bénéfices multiples telles que les solutions fondées sur la nature.

Ensuite, l’Association pour le management des risques et des assurances de l’entreprise (AMRAE) va lancer des travaux avec les filières économiques pour produire des guides sectoriels d’évaluation des vulnérabilités au regard des risques physiques auxquels sont exposés les sites. Ce travail portera en priorité sur les filières potentiellement les plus impactées telles que l’agroalimentaire, la transformation du bois, la chimie et les matériaux, la gestion de l’eau, les activités de transport, les réseaux énergétiques, la culture et le tourisme, les matériaux de construction et le bâtiment, le secteur de la logistique.

Enfin, l’ADEME et BpiFrance vont mettre à jour en continu un catalogue d’outils recommandés par l’Etat pour s’adapter au changement climatique. Le catalogue sera déployé en ligne et sera librement à la disposition des entreprises.

Ce catalogue est déployé ici.

Vous l’avez compris, l’adaptation au changement climatique doit devenir un réflexe collectif de tous les acteurs pour réussir !

 

> Agnès Pannier-Runacher a été nommée ministre de la Transition écologique, de l’Énergie, du Climat et de la Prévention des risques en septembre 2024.

Elle était préalablement ministre déléguée à l’Agriculture (de février à septembre 2024) ; ministre de la Transition énergétique (mai 2022 à janvier 2024) ; ministre déléguée chargée de l’Industrie auprès du ministre de l’Economie, des Finances et de la Relance, Bruno Le Maire, depuis juillet 2020 ; secrétaire d’État depuis octobre 2018.

Elle était avant cela directrice générale déléguée de la Compagnie des Alpes (2013-2018), acteur clé du secteur européen des loisirs et leader mondial de l’exploitation de domaines skiables.

Auparavant, Agnès Pannier-Runacher a été directrice d’une division R&D de Faurecia Interior Systems (sous-traitance automobile), directrice exécutive et membre du comité exécutif du Fonds stratégique d’investissement (devenu BpiFrance), directrice adjointe des finances et de la stratégie à la Caisse des dépôts et directrice de cabinet de la directrice générale de l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris (2003-2006).

Elle a débuté sa carrière comme inspectrice des finances au ministère français de l’Economie, des Finances et de l’Industrie, où elle a travaillé sur la mesure de la performance dans les administrations de l’État, l’investissement socialement responsable et le financement du logement social. Elle est diplômée de HEC et ancienne élève de l’École nationale d’administration (ENA), et dispose d’un master européen CEMS HEC-KölnUniversität.

Par ailleurs, elle est « Rising Talent » du Women’s Forum 2007 et chevalier de l’ordre national du mérite en 2016. Elle a reçu le prix de la femme d’influence en politique en 2020 et fait partie des 40 femmes Forbes 2020.

 

> A lire également sur le site de la Fondation Travailler autrement : Des métiers polluants aux emplois verts : réussir la transition écologique sans laisser personne de côté, Transition écologique : quand métiers et compétences s’adaptent pour un monde en transition, Transition écologique : quelle place pour les cadres ?, 4 Questions à… Sylvain Waserman, PDG de l’Ademe