Freelance, une valeur ajoutée pour l’entreprise ?
L’augmentation rapide du nombre de freelances, l’essor de la pluriactivité et du travail indépendant ont changé les modes de travail aussi bien pour les travailleurs que pour les entreprises. Si le travail en freelance donne la possibilité à chacun de se forger un avenir professionnel en lien avec ses aspirations, l’essor de ce mode de travail invite à repenser les relations entre les entreprises et leurs forces de travail, qui ne sont plus uniquement salariées. Compte rendu de la table ronde « Us & them » organisée le 16 mars 2017 à l’occasion de la Freelance Fair.
Pour Camille Muller et Fabien Grenet, cofondateurs de There is no spoon, ce nouvel équilibre est à construire et ils invitent les intervenants à réfléchir sur des éléments de réponse aux trois interrogations suivantes : la valeur ajoutée pour l’entreprise de travailler avec des freelances, les difficultés vécues par les deux parties ainsi que les moyens permettant de fluidifier les collaborations.
Les freelances, une vraie richesse pour l’entreprise
Assanatou Bouaré, chargée de partenariat, de l’économie collaborative et des pratiques émergentes à la MAIF, témoigne des multiples partenariats de la MAIF avec des freelances. Pour elle, les freelances sont de vraies richesses pour l’entreprise. Ils renforcent ses rangs quand il y a un manque de main d’œuvre sur certains savoirs-faire ou sur des nouveaux métiers absents dans l’entreprise. Les freelances ont une influence positive sur l’entreprise car ils ont une vision, une ouverture d’esprit et une façon d’être qui leur sont propres et qui nourrissent les pratiques managériales de l’entreprise.
Quentin Debavelaere, COO d’Hopwork, compare l’influence des freelances dans l’entreprise au travail des abeilles : ils assurent la pollinisation de l’innovation. Pour lui, les freelances permettent à l’entreprise d’être plus agile et d’acquérir des connaissances et des savoirs-faire dont elles ont besoin à un instant T. C’est aussi un atout en termes de rapidité : recruter un collaborateur en CDI se fait en moyenne en quatre mois, alors qu’un freelance est disponible en moins d’une semaine.
Julie Chanal, responsable des projets Web de Paris Numérique à la Mairie de Paris, témoigne quant à elle d’un transfert de compétences entre les freelances et ceux qui travaillent à la Marie de Paris. L’organisation des bureaux en open-space participe de cela et ceux qui collaborent apprennent les uns des autres.
Pascal Semy, fondateur de Manager de Talents, note que les mutations en entreprise ont débuté dès la création du statut d’auto-entrepreneur. Comme Quentin Debavelaere, il donne la souplesse et l’agilité comme étant les deux principaux atouts de la collaboration avec des freelances.
Frédéric Assémat, co-fondateur de Gentle, ajoute que pour les start-up, travailler avec des freelances est une question de survie, surtout au démarrage. Les freelances sont pour lui « de véritables collègues », ils sont intégrés au projet. Les freelances viennent souvent combler un manque et ça lui donne une force dans l’entreprise. Chez Gentle, les freelances ont presque autant de poids que les fondateurs.
Pour la MAIF, cette observation n’est pas tout à fait vraie car le siège social étant à Niort, les freelances ne travaillent pas nécessairement dans les locaux, et il est donc plus difficile de les considérer comme des collègues. En revanche, elle souligne un nouvel atout : ils ont une liberté d’esprit et de parole que n’ont pas toujours les salariés. C’est précieux pour l’entreprise qui a parfois besoin d’entendre les critiques (positives comme négatives) pour pouvoir évoluer.
Pascal Semy ajoute sur ce point que les freelances sont mobiles et adaptables : « c’est dans leur ADN ». C’est une force, notamment car ils peuvent s’éloigner des métropoles pour exercer leur activité. Ce nomadisme donne du sens à ce qu’ils font.
Relations entreprises/freelances, des adaptations nécessaires
Julie Chanal a ensuite ouvert le débat sur les difficultés à travailler avec des freelances. La plus grande difficulté à la Mairie de Paris tient essentiellement dans la prise de contact avec le freelance : ce dernier doit répondre à un appel d’offre public, ce qui est parfois long et contraignant. Pour répondre à cette contrainte et s’ouvrir plus aux indépendants, la Mairie de Paris aide les freelances à répondre aux appels d’offre.
La question du délai de paiement est ensuite soulevée. Pour Frédéric Assémat, il lui est impensable de faire appel à un freelance si la start-up n’a pas les moyens de le payer. La MAIF a quant à elle instauré un système d’acompte. Mais pour Assanatou Bouaré, la plus grande complexité se trouve dans la gestion du planning. Pour répondre à cela, il faut, selon elle, qu’il y ait la plus grande transparence et la plus grande honnêteté entre les co-contractants. La clé pour que les deux parties puissent respecter leurs délais réside dans une bonne communication et l’anticipation (ce qui passe aussi par une excellente compréhension des contraintes de chacun).
Sur la question des prix, les intervenants s’accordent à dire qu’il faut là aussi faire preuve d’honnêteté : le freelance ne peut pas surévaluer sa prestation de service mais les entreprises ne peuvent pas non plus sous-évaluer le travail des freelances en se basant simplement sur le fait qu’ils sont freelances. Pour éviter ces dérives, la Mairie de Paris a mis en place un système de grille de tarifs.
Pour conclure, Pascal Semy souligne que la relation entreprise/freelance est avant tout une relation humaine et donc, il faut aussi savoir s’adapter.
> À lire également sur le site de la Fondation Travailler autrement :
Étude – Les travailleurs indépendants : identités, perceptions, besoins
Portrait d’une nouvelle catégorie de travailleur